Cette pauvre agave est souvent confondue avec l’aloé vera. Rien à voir pourtant, elles ne font pas partie de la même famille. Même pas une cousine ou une grand’tante. Et surtout, il n’y en a qu’une qui permet de produire la tequila. Oups… il paraît qu’il faut dire LE tequila. Je ne vous emmène pas jusqu’au Mexique cette semaine, car on trouve aussi des agaves en Martinique.

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L’agave que j’ai trouvé ne donne pas la Tequila, car il n’y a que l’agave bleue qui le fait, et pour les puristes purs et durs, l’agave bleue qui pousse dans le village de tequila, au Mexique et qui a donné son nom à la boisson.

Celle que j’ai trouvée s’appelle, je pense, Agave caribaeicola, endémique de la Martinique. Comment j’ai trouvé son petit nom ? En lui comptant les épines et en lui flattant la croupe. Car c’est comme ça qu’on les différencie entre elles : y a-t-il des épines sur le côté des feuilles ? oui. De quelle taille ? Des petites. Les feuilles sont elles droites ou incurvées ? Partent-elles du sol ou d’un tronc, d’une tige ? Quelle taille ? Y a-t-il une épine au bout de la feuille ? de quelle couleur ? de…

Alors je ne sais pas si la mienne d’Agave a la capacité de produire une boisson alcoolisée ou de produire des fibres comme sa cousine le sisal ou de guérir. Car finalement, dans la littérature, c’est l’Agave americana qui revient le plus souvent et semble avoir été la plus étudiée. Sinon, on parle d’Agave tout court sans les différencier.

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La vaste arnaque du sirop d’Agave

On peut en tirer le fameux sirop d’agave, vous savez, ce super-aliment qui a fait la une de tous les webzines dans les années 2000 et surtout la fortune des industriels qui se sont engouffrés dans la brèche. Ben oui, le sirop d’agave, c’était miraculeux, naturel, il permettait de sucrer mais avec beaucoup moins de calories que le sucre blanc, on l’a même conseillé aux diabétiques. Quelle erreur ! En réalité, le sirop d’agave est paré de bien moins de vertus qu’on veut nous le faire croire, et surtout, il n’est pas à conseiller aux diabétiques. En fait, c’est plus complexe que ça, et sa valeur glycémique dépend de la manière dont il a été produit (chauffé notamment).

D’où ça vient ce sirop en fait ? Eh bien, une fois la plante cultivée arrivée à maturité, on lui coupe ses feuilles pour récupérer le coeur, qui est surnommé “pina” en raison de sa ressemblance avec un ananas une fois dépouillé de ses feuilles. Ce coeur subit un process de transformation (cuisson, pressage) par lequel on extrait le jus d’agave

Agave et boissons alcoolisées

La Tequila est la boisson obtenue à partir du jus d’agave bleue (Agave tequilana) qui aura été fermenté puis distillé. Mais ce n’est pas la seule boisson alcoolisée qui est produite. Il y a aussi le vin tlachique obtenu à partir des Agaves salmania et lehmanii, le pulque à partir de Agave atrovirens. Globalement il faut 7kg de coeur d’agave (pina) pour obtenir 1l.

D’ailleurs, le nom même de l’Agave qui trouverait sa racine dans le grec et signifierait « digne d’admiration » viendrait de sa capacité à produire cet alcool.

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L’Agave va vous habiller pour l’hiver: des fibres

L’Agave sisalana ou sisal est utilisée en Afrique pour fabriquer des cordages par exemple. Les feuilles sont décortiquées pour récupérer les fibres, qui sont ensuite lavées et séchées au soleil. Elle fait partie de ce qu’on appelle les plantes textiles.

Agave americana est quant à elle à l’origine d’une autre fibre, moins connue, dénommée « pita » utilisée au Mexique et dans les Antilles.

Les propriétés médicinales de l’Agave americana

La pulpe des feuilles qui reste une fois que les fibres ont été récupérées contient un jus riche en hécogénine à partir de laquelle on sait fabriquer de la cortisone. On trouve également ce composé dans les racines.

Ce jus est aussi réputé utile pour freiner la chute des cheveux.

L’agave americana est utilisée en médecine traditionnelle pour ses multiples vertus curatives : les feuilles sont réputées dépuratives, diurétiques, utiles en cas de troubles intestinaux, ictères et inflammation des yeux. Comme l’aloé, le jus des feuilles est appliqué sur les plaies et les coupures pour favoriser la cicatrisation.

Le jus aurait aussi des propriétés insecticides et est utilisé contre les termites en Tanzanie.

Coupée en morceaux et chauffée, la feuille est appliquée en usage externe pour les douleurs rhumatismales.

Enfin, Agave americana est la source d’un médicament contre l’hypertension.

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L’agave, une plante adaptée à la sécheresse

Elle fait partie de ce qu’on appelle les plantes succulentes. Elle a mis au point un système de stockage de l’eau pour faire face à la sècheresse (c’est pour ça qu’elle peut survivre en plein désert mexicain, comme les cactus).

Elle fait en plus partie d’une catégorie de plantes un peu spéciales qui ont la capacité à fixer le CO2 la nuit et à réaliser leur photosynthèse le jour mais avec leurs stomates fermés pour éviter les déperditions d’eau.

Sa floraison est impressionnante puisqu’elle produit une hampe florale qui peut atteindre les 8 m de haut. Après floraison, en général, elle meurt.

Elle est considérée comme relativement invasive puisqu’elle se reproduit par multiplication végétative, en faisant des petits bulbes qui vont aller s’installer à côté et ainsi de suite.

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    4 replies to "Si je vous dis… tequila ! Un mot sur l’agave"

    • Jean-François BERNARD

      Bonjour,
      je trouve vos articles très bien, scientifiquement précis et cependant faciles à lire et même agréables à lire ; je voudrait vous suggérer d’attirer l’attention sur la vulnérabilité de beaucoup de plantes indigènes non cultivées » Ces plantes sont cueillies dans la nature et certaines sont très rares (voir doc disponible Conservatoire Botanique, DEAL, liste rouge UICN…) Nous n’en somme qu’au début de l’exploration des possibilités médicinales des plantes indigènes (je vois de nombreux articles sur les vertus de plantes locales qui ne sont pas encore connues en médecine créole traditionnelle). La nature ne sera jamais l’objet de l’attention et de la sensibilité suffisante pour la préserver si on continue de l’exploiter sans trop se poser de question. Votre travail va dans le sens de sensibiliser les gens à l’idée d’un monde végétal extraordinairement plus riche que la visée consommatrice pourrait le soupçonner ; cependant, mon expérience de plus de 30 années d’efforts pour la protection de la nature à la Guadeloupe et à la Martinique m’ont convaincu que sans sensibilisation à la grave diminution de la biodiversité dans ces îles, on risque lors d’une sensibilisation insuffisamment prudente, d’obtenir non pas une meilleure protection mais l’effet inverse.

      • Cécile Mahé

        Bonjour Jean-François, merci pour votre commentaire et ce rappel important. Pour ne pas « alourdir » les articles, je ne le rappelle sans doute pas assez, préférant ranger ces considérations « écolo » (ça va bien au-delà pourtant) dans mes billets d’humeur pour ne garder que l’émerveillement et le positif sur les articles.

        J’espère que les lecteurs font le lien entre ces merveilles végétales, leurs potentialités et la nécessité de les respecter. Les respecter, mais pas les sanctuariser. Je refuse la vision d’une nature sous cloche aux mains de quelques experts et conservateurs qui refusent de diffuser des connaissances qui nous appartiennent à tous et qu’ils ont eux-mêmes souvent collectées auprès de nos grands-parents! Je prend le paris que le savoir est moins destructeur que l’ignorance.

        Le droit de pouvoir se servir dans une nature non polluée pour se soigner et s’alimenter gratuitement me paraît être un bel idéal. Plus nous serons nombreux à savoir, plus nous serons à planter, mieux ce sera.

        Mais comment donner envie de planter quand on ne sait même pas à quoi servent ces plantes? Quelles sont leurs merveilleux secrets? Donc, c’est mon parti pris. Je sais que ce n’est pas celui des institutionnels, mais qu’importe, chacun fait de son mieux 🙂

    • Vincent

      Je m’étais souvent demandé comment on faisait de l’alcool avec cette plante et maintenant c’est plus clair, merci. Par contre je ne connaissais pas toutes ces propriétés médicinales, ce blog me surprend à chaque article!
      J’ai fait une recherche sur le net pour « plantes succulentes » je ne connaissais pas ce terme et j’ai compris que j’appelais ça « plante grasse ». Au final l’agave s’oppose vraiment à l’expression « faire la plante verte » car elle est loin d’être inutile. 😉
      Merci pour toutes ces infos.

      • Cécile Mahé

        Merci Vincent 🙂

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