Des papillons. Voilà le point de départ de cet article. Oui, je sais, c’est une abeille sur la photo un peu plus loin, manque de pot. On ne peut pas toujours rester là à attendre le cliché parfait. Et n’est pas passionné d’entomologie qui veut. J’ai mis la main sur un document qui recense les plantes qui donnent le gîte et le couvert à nos amis lépidoptères. Enfin, ami, ami, entendons-nous bien, j’aime les regarder mais quand leur progéniture rampante me bouffe mes plantes, c’est une autre musique ! Donc voilà comment je me suis rappelée de cette jolie plante à fleur jaune, Cassia alata ou Senna alata. Elle abrite tout plein d’espèces différentes de papillons. Une véritable auberge. Mais pas que.

Cassia alata, une plante ornementale qui attire les ravageurs

Pas étonnant qu’elle les attire. D’ailleurs, c’est pour cette raison que la station d’expérimentation du Conseil général en a planté : pour les attirer, car c’est bien connu, de nombreux insectes, de ceux qui ravagent les cultures, adorent les plantes à fleurs de couleurs vives, jaunes, oranges. D’où l’idée de les planter à proximité des cultures qu’on veut protéger. Tant que les insectes viennent faire leurs folies par ici, ils n’iront pas là-bas. Ou moins.

Mais il ne faudrait pas non plus en abuser, car elle aurait tendance à devenir une « mauvaise » herbe dans les pâtures, où elle n’est pas consommée par le bétail. Apparemment, elle pourrait être toxique pour les chèvres.

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Où se cache la belle casse ailée ?

Mais notre si belle casse ailée n’est pas le genre à jouer les potiches façon belle plante, elle a plus d’un atout dans son sac, enfin, je veux dire ses feuilles. Car en réalité, l’or n’est pas dans ses fleurs contrairement à ce que pourrait laisser croire leur couleur fabuleuse. Ces grappes dorées ne passent pas inaperçues dans le paysage. Elles sont si jolies d’ailleurs, qu’elles sont plantées en tant qu’arbustes d’ornement et pour attirer les pollinisateurs.
Elles se montrent dans les zones humides. Car notre belle tirée à Quatre-épingle (c’est un autre de ses noms) aime bien avoir les pieds dans l’eau. Bord de rivière, cours d’eau, bord de route, lisière de forêt pluviale, on la trouve en Martinique un peu partout, dans des milieux perturbés (elle doit aimer voir du monde) à moins de 500m d’altitude. Bon, c’est vrai, pour la trouver, c’est plus facile de la repérer quand elle fleurit de novembre à janvier.

Cassia alata à la conquête du monde !

Enfin, la Martinique, la Martinique… c’est bien trop petit pour une plante de son envergure. Elle s’est répandue depuis le détroit de l’Orénoque dans le monde entier. Mais là où c’est extraordinaire, c’est que les usages convergent. De par le monde, la médecine traditionnelle s’accorde à dire que c’est LA plante pour les dermatoses. Les feuilles de Cassia alata sont utilisées pour soigner les maladies de peau aussi bien dans les Caraïbes qu’en Amérique du Sud ou de façon plus lointaine en Afrique comme le relate Pierre Saulnier.

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Usage médicinal traditionnel de l’herbe à dartre

Ce n’est pas pour rien qu’elle est aussi communément appelée « dartrier ». C’est parce qu’elle est indiquée pour soigner les dartres, ces plaques sèches qui se forment sur la peau, causées par un champignon. En clair, c’est une mycose, et ça, nos plantes médicinales, elles savent y faire !

Mais plus globalement c’est une amie de la peau et l’ennemie de toutes sortes de dermatoses. Contre les mycoses de la peau, dartres, herpès, gale, eczéma, pellicules dans les cheveux, taches de Lotha, impétigo, teigne, ulcères, psoriasis, érythème tous les auteurs s’accordent pour mettre en avant l’efficacité des feuilles fraîches écrasées à mettre directement en contact avec les lésions (ou uniquement leur jus). Des bains de feuilles étaient traditionnellement faits en Martinique, en association avec d’autres plantes comme le gliricidia ou le fromager. Des préparations plus élaborées en pommade sont également utilisées. En l’absence de plante fraîche, Longuefosse propose l’utilisation des feuilles séchées en poudre auxquelles on ajoute un peu d’eau pour former une pâte.

Selon Boullard, son efficacité est reconnue dans au moins trois continents (Afrique, Amérique et Asie !) contre l’herpès circiné !

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La science a validé ces usages dermatologiques en reconnaissant des propriétés antibiotiques, antiherpétique, antiparasitaire, antimicrobiennes. Pour Kerharo (en 1974 déjà !), c’est la présence d’acide chrysophanique qui explique l’activité de la plante sur les dermatoses. Encore avant, c’est la rhéine contenue dans les feuilles qui a été « suspectée » d’un effet antiherpétique.
Et vous savez quoi ? En faisant mes recherches, j’ai vu qu’un labo en avait même tiré un actif breveté pour une gamme de cosmétique aux propriétés cicatrisantes. Ca, ça se passe à Madagascar.

La voie interne peut également être envisagée, mais sur une courte période en raison de son effet laxatif et des lésions intestinales qu’elle peut provoquer. Là encore, ce sont les feuilles qui sont plébiscitées par les différents auteurs, ici pour soigner la constipation et les maux de ventre, là pour les troubles hépatiques (foie, flux biliaire, ictère ou jaunisse) grâce à ses vertus cholagogues et effectuer des purges. Aux Antilles, Longuefosse précise que l’infusion des feuilles est réputée « nettoyer le sang ».

Pierre Saulnier relève un usage en Afrique des racines de Cassia alata contre les vers (Ascaris) qui n’est pas repris par les autres auteurs.

En Inde, la décoction des feuilles sert d’expectorant.

L’écorce est utilisée comme poison de pêche et pour tanner le cuir.

Les différents noms de Cassia alata/ Senna alata

Bref, c’est une amie de la peau internationalement reconnue pourrait-on dire ! D’où les nombreux petits noms dont je l’ai affublée au fil du texte. Chaque pays a le sien, difficile de les recenser tous. En voici quelques uns :

  • quatre-epingle-cassiaCassia alata, Senna alata, Kasialata (ne pas confondre avec Cassia occidentalis ou faux kinkéliba, ou avec Cassia fistula, la casse ou canéficier qui ont aussi des propriétés médicinales)
  • Casse ailée
  • Casse puante
  • Dartrier, Herbe à dartre
  • Quatre-épingle, Anjananjana, andrabay (à Madagascar)
  • Christmas candle ou candle stick pour les anglais (ça c’est imagé !)

 

Ressources consultées pour la rédaction de l’article:

Base Prota4u
Association Jardins du monde, posters

    8 replies to "Cassia alata: de l’or dans les feuilles du dartrier"

    • danielle

      Merci pour cette mine d’information, vous êtes géniale de vouloir partager avec moi.

    • danielle

      Bjr Cécile
      comment réaliser l huile de casia alata et l huile de menthe.
      comment reconnaître la menthe poivrée

    • vavaltropik

      La sorcière et le médecin : laisse présager un jolie voyage. Belle initiative.
      Je ne manquerais pas de parler de vous à mon entourage;

      • Cécile Mahé

        Merci Vavaltropik 🙂

    • youke jacques

      Merci pour m’avoir permis d’acquérir des leçons merci bonne journée

      • Cécile Mahé

        Avec plaisir Jacques 🙂

    • Houngnon Alfred

      Merci pour cet engagement à la valorisation et au partage du savoir

      • Cécile Mahé

        Avec plaisir ALfred 🙂

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